Pascal Ruef Art Visuel

Pascal Ruef est un artiste qui vit et travaille à Lille. La photographie, la vidéo, la sérigraphie et l'estampe numérique sont autant de techniques qu'il expérimente et pratique. Initialement, il découvre la photographie, alors argentique, grâce à son père. Par la suite plusieurs voyages en Asie et en Amérique du sud lui permettent de développer son regard et sa technique de façon autodidactique. Il se tourne ensuite vers la sérigraphie, l`estampe numérique et la vidéo. Sa recherche est dirigée vers le contraste, les formes abstraites présentes dans la nature, dans une démarche visant à révéler une écriture de la lumière où l'analogie et l'intuition opèrent en révélateur. Il recherche également l'instant décisif chère à Cartier Bresson ou la vie se condense et se fige à travers l'œilleton du viseur. Privilégiant le noir et blanc, il développe aujourd'hui des diptyques ( série dioptique) où deux images juxtaposées entrent en résonance, révélant des analogies formelles ou systémiques en reliant deux instantanés de vie. Il expose à présent dans différents lieux d'art ses travaux de différentes techniques, parfois mixes.

"NOOSYSTEMES"

Ces œuvres sont construites sur le mode du collage dans une démarche où les notions de pattern, de plan et de diagramme sont prépondérantes. Il s'agit d'un plan de machine abstraite incluant des symboles et des figures à caractères scientifiques, mathématiques, géométriques, métaphysiques, sacrés et spirituels issues de la noosphère. La noosphère, selon la pensée de Vladimir Vernadsky et Pierre Teilhard de Chardin, désigne la « sphère de la pensée humaine ». Le mot est dérivé des mots grecs νοῦς (noüs, « l'esprit ») et σφαῖρα (sphaira, « sphère »), par analogie lexicale avec « atmosphère » et « biosphère ». Intitulée "Noosystémes" ces œuvres fait apparaître la figure d'un «sujet cybernétique» mise en œuvre par le jeu des symboles et des opérations logiques qui l'anime. Ce «sujet cybernétique» nous confronte à notre devenir machine là où la figure du singe nous renvoie à notre origine animale.

Ce devenir machine reposant essentiellement sur des bases numériques, c'est un nouveau pythagorisme, dans lequel le nombre constitue l'essence et le principe des choses, qui semble se faire monde ou machine universelle aujourd'hui. En analogie directe avec des figures comme les mandalas tibétains ou les yantras indiens, cette frise diagrammatique révèle un ensemble de mondes comme autant de sphères en interaction. Différentes figures revisitées composent cet ensemble comme la « Tétraktys » pythagoricienne, l'arbre séphirotique de la Kabbale, ou encore le panopticon de Bentham figure qui réalise selon Foucault l'abstraction diagrammatique d'une société disciplinaire axée sur le contrôle social.

En 1936, Alan Turing a proposé le concept de machine universelle. Il montrait alors comment un système logique minimum permettait de déterminer toutes fonctions calculables. Ce travail, qui est à l'origine de l'ordinateur (votre PC n'est rien d'autre qu'une machine universelle de Turing finie), a donné lieu à la thèse de Church-Turing. Dans sa version de base, elle énonce que toute fonction calculable l'est par une machine de Turing. Cette thèse a été élargie dans ce que l'on qualifie de « version physique » selon laquelle une machine de Turing peut réaliser toute opération de traitement de l'information réalisable par un système physique. L'interprétation faible de cette thèse pose ainsi que tout système pouvant être décrit comme un automate peut être simulé par une machine de Turing. Selon l'interprétation forte, une machine de Turing universelle peut reproduire le comportement de tout système physique. De là la tentation cybernétique et transhumaniste de considérer l'humain comme un système physique reproductible.

Considérant le cybermonde dans toute son ambivalence, c'est à dire comme enfer et paradis, poison et antidote, la figure du mandala est interprétée dans cette œuvre comme le diagramme du monde digital devenu à la foi encyclopédie universelle et panopticon global. Cette dimension critique porte sur la notion de contrôle et de surveillance qu'implique l'électronique et le numérique. «Le Panopticon ne doit pas être compris comme un édifice onirique: c'est le diagramme d'un mécanisme de pouvoir ramené à sa forme idéale ; son fonctionnement, abstrait de tout obstacle, résistance ou frottement, peut bien être représenté comme un pur système architectural et optique : c'est en fait une figure de technologie politique.» (M. Foucault, Surveiller et punir).

(Les images exposées ici sont en ventes, imprimées sur dibond ou papier fine art sur demande.
Nombreux formats possibles.)